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Alex Lutz et Audrey Lamy à cœur ouvert: «Elle est le soleil, je suis la lune» - Le Figaro

INTERVIEW - Auteur, réalisateur et interprète de La Vengeance au triple galop, il a écrit un rôle sur mesure à son amie de longue date. Entretien croisé entre deux artistes affichant une belle complicité.

Alex Lutz (Catherine et Liliane, Guy) coécrit et met en scène les spectacles d’Audrey Lamy (Dernières avant Vegas, Tout ce qui brille, Scènes de ménages) depuis 2009. Il lui a aussi offert le double rôle de Stéphanie Harper - Dolly Pranners dans La Vengeance au triple galop , parodie d’un soap opéra des années 80 pour Canal +, afin de montrer toutes les facettes de son talent. Au Festival de la fiction de La Rochelle, où l’unitaire a remporté le prix de la comédie, ils se sont livrés.

TV MAGAZINE. - Comment vous êtes-vous rencontrés?
Alex LUTZ. -
Grâce à Jean Dujardin lorsque nous tournions OSS 117: Rio ne répond plus. Je mettais en scène le one woman show de Sylvie Joly et je cherchais à diriger une comédienne de ma génération. Elle faisait partie de sa famille (Audrey est la sœur d’Alexandra, alors compagne de Jean Dujardin), mais il était sincère. Moi qui suis au premier abord aimable comme une porte de prison, je la rencontre donc pas très gentiment. Enfin, je ne suis pas la chaleur incarnée mais je suis gentil et loyal! Autant elle est le soleil, autant je suis la lune... Bref, elle me joue un sketch sur une comédienne qui anime des anniversaires. Elle commence par: «Bonjour Anthony, c’est ton anniversaire et je suis Belle la fée de La Belle au bois dormant...» J’ai ri immédiatement à sa manière de jouer. Ça m’a fait le même truc intérieur que le critique gastronomique dans Ratatouille: «Bing, bang, ah ouais...» J’ai ressenti ça avec peu de gens, ce fut le cas avec Bruno Sanchez (son comparse de Catherine et Liliane) aussi. Je l’admire et c’est une amie très proche.
Audrey LAMY. -
Moi je cherchais un partenaire pour m’aider à écrire mon spectacle et le mettre en scène. C’est comme une danse, quand on a un partenaire qui nous fait bien danser, on a l’impression d’être la meilleure danseuse du monde. Il me porte. Il aime observer les gens dans les cafés, détaille tout. Il adore composer des personnages, les interpréter, comme moi, plutôt que de faire du stand-up. Il est difficile de trouver son binôme, nous nous sommes trouvés.

Il était évident que c’était votre héroïne?
Alex. -
Oui, je lui fais des infidélités artistiques, elle me fait des crises de jalousie, mais elle reste celle qui m’inspire le plus. Mais je n’écris pas assez vite, j’ai 2000 idées à développer, il me faudrait un algorithme!
Audrey. -
Alex m’a donné à lire le projet sans me préciser ce qu’il allait en faire. J’ai trouvé le scénario génial. Il m’a dit: «Mais je te propose le rôle de l’héroïne, banane!» Et m’a engueulée car je n’avais pas compris que c’était pour moi... Il a tout fait pour me mettre en valeur, il a voulu montrer ce que je sais faire. J’avais une base solide et un panel de jeu fantastique.
Alex. -
Je voulais en effet qu’elle sache tout faire, une boîte de poupée avec toutes les poupées: poupée docteur, poupée chanteuse...

«Je suis extrêmement féministe»

Alex Lutz

Comment doser le jeu entre la sincérité et l’outrance?
Alex. -
Je fais autant de drame que d’humour, c’est la même énergie de jeu. L’humour est plus horloger, plus binaire. Il y a un travail de diction inspiré de la voix de Jennifer Hart dans Pour l’’amour du risque. Ou même, souvenez-vous de Dawson. Ils ont 35 ans, sont censés jouer des ados. Ils se parlent, très sérieusement, près des casiers: «J’envisage peut-être de partir à l’université, je ne sais pas si j’irai dans le Nord-Est du pays ou plutôt dans le Sud, selon quoi on ne se verra pas forcément». Et Michelle Williams pleure en répondant: «Alors, ça veut dire que je ne te reverrai pas à la rentrée?» Ils ont des phrases extrêmement construites, et on buvait ça! Je ne suis pas un vanneur, j’essaye de trouver le point d’humour.
Audrey. -
Visuellement, c’est déjà tellement fort, on est en épaulette, en flashy, en faux ongles, si en plus on surjoue... Alex m’a dit: «D’abord on va être sincère, le degré d’absurde, le grain de folie viendront avec l’amusement».

La dimension féministe du personnage vous importait?
Alex. -
Oui je suis extrêmement féministe. Mais il n’y a pas forcément une dimension féministe. C’est une femme qui prend son destin en main. Il n’y a pas si longtemps encore, on aimait montrer des héroïnes un peu naïves, un peu stupides, et parce qu’elles avaient mal pensé leur histoire d’amour, elles le payaient un peu... Et en France, dans les années 50, on appelait encore parfois une fille sans chapeau, une fille en cheveux, autrement dit une pute. Le mouvement actuel est merveilleux. On peut s’en réjouir même si ça fout un peu la frousse. Dans les révolutions, certains font n’importe quoi. Mais je ne vais pas me permettre moi de donner des points même si les discours sont variants, trébuchants.

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