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Nancy : « La réalité virtuelle au bloc opératoire, ce n’est pas un gadget » - lasemaine.fr

Photo DR

Scalpels, compresses, antiseptiques et désormais… casque de réalité virtuelle. Depuis quelques semaines, les patients opérés dans les cliniques du groupe Elsan peuvent s’immerger dans un univers apaisant en 3D et en musique. Une technologie qui s’inspire de l’hypnose qui facilite l’anesthésie et améliore la récupération post-opératoire. Thierry Maday, anesthésiste-réanimateur à la polyclinique de Gentilly, nous en explique les bénéfices.

Vous avez fait entrer la réalité virtuelle au bloc opératoire, pourquoi ce choix ?

Nous avons commencé cette expérimentation il y a un peu plus de deux mois car le casque de réalité virtuelle (VR) donne la possibilité de mettre le patient dans un état modifié de conscience assez facilement. Le casque VR c’est un peu l’hypnose prête à l’emploi ! C’est assez ludique et le fait de passer par l’image et le son réduit l’appréhension des patients qui ont parfois un peu peur de l’hypnose médicale « classique ». Comme ces casques sont aussi utilisés dans les jeux vidéos, certains ont pu y voir un gadget en médecine, ce n’est pas le cas. Ils ne sont pas indispensables mais ils sont très utiles et permettent de diminuer de 75 à 80% les doses de produits anesthésiants. La confrontation avec le bloc opératoire, le bruit, la lumière, l’environnement global peuvent susciter de l’appréhension, l’utilisation du casque déconnecte le patient de cet endroit anxiogène et rend l’intervention plus acceptable. C’est un élément supplémentaire dans la prise en charge des malades qui améliore leur vécu de l’examen ou de l’intervention. C’est un aspect très important de la prise en charge et cela permet, en plus, une meilleure récupération et un retour plus rapide à domicile.

Que voit-on et qu’entend-on dans ce casque ?

C’est un peu à la carte ! Un jardin zen, une plage de sable fin, des sommets enneigés… Les patients ont le choix entre six destinations de rêves. Ils peuvent également choisir une voix masculine ou féminine et le style de musique d’accompagnement. Rien n’est imposé et chacun est acteur de son choix. Le patient porte son masque dès l’entrée au bloc, et, après deux ou trois minutes d’induction hypnotique et une sédation légère l’intervention peut commencer. J’utilise le casque lors d’explorations invasives qui peuvent provoquer des douleurs. Je suis à côté du patient, attentif au moindre signe. Le casque permet d’intervenir à tout moment pour distraire le patient de cette douleur ; par des stimuli visuels ou sonores on arrive à la mettre à distance. Au pire, on peut renforcer l’anesthésie mais cela ne m’est pas arrivé une seule fois en deux mois.

Dr Thierry Maday. Photo DR

Est-ce différent de l’hypnose médicale ?

L’hypnose fait parfois un peu peur, peut-être parce qu’en France on peut l’utiliser pour du spectacle et les gens l’assimilent à une perte de contrôle et à de la manipulation mentale. L’hypnose médicale existe depuis longtemps et a fait ses preuves mais elle implique souvent une préparation importante du patient avec plusieurs rendez-vous, beaucoup de déplacements et ce n’est pas forcément évident pour les non aguerris de se mettre en condition le jour J. Le casque VR rend les choses beaucoup plus simples et permettrait de démultiplier l’efficacité et la puissance de l’hypnose, grâce à une immersion multi-sensorielle propice à l’état hypnotique.

Cela peut-il être proposé à tous les patients et pour tout type d’intervention ?

Non, le casque n’est pas magique et donc pas destiné à tous les patients! ! Certains ont besoin d’une anesthésie générale, d’autres non. Il vaut toujours mieux prendre en charge un patient de façon bien réglée plutôt que de proposer systématiquement la même chose sans distinction. Nous l’utilisons actuellement au Médipôle de Gentilly pour les explorations invasives en endoscopie et en cardiologie mais aussi en cancérologie pour certains soins douloureux et bientôt pour lutter contre les vomissements après chimiothérapie souvent provoqués par l’anxiété. La pratique est amenée à se développer dans d’autres services, y compris en pré-opératoire. Quand une technologie aide à mieux vivre un intervention, à réduire angoisses et douleurs, à garder un souvenir positif de son passage au bloc opératoire et à récupérer plus vite avec moins de médicaments pourquoi s’en passer ? Dans le cadre d’une pratique unifiée, mes collègues anesthésistes du Médipôle vont très bientôt tous l’utiliser.


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